June ne pouvait s’empêcher de regarder dans tous les sens, se moquant bien de se tordre le cou, ne voulant pas rater la moindre chose, le moindre détail, ni même la moindre demeure. Elle ne pouvait être plus émerveillée qu’elle ne l’était à cet instant. Accrochée fermement à Nolan, peu désireuse de le perdre, sachant qu’elle paniquerait si elle se retrouvait totalement seule dans telle foule, ou même si elle se retrouvait tout simplement sans lui à ses côtés. Elle lui devait tant et elle ne savait comment il faisait pour la surprendre toujours autant et pour si bien s’occuper d’elle. Il s’était surpassé cette fois avec la Nouvelle-Orléans. Elle avait été si étonnée lorsqu’il lui avait proposé ce voyage et n’avait pas perdu son sourire radieux depuis cette annonce d’escapade en tête-à-tête. Elle n’était jamais sortie de Californie, et même dans l’Etat, elle avait que très peu bougé. Qui mieux que lui pouvait la faire vivre autant de nouvelles aventures ? Lui qui avait été si occupé ces derniers temps, si mystérieux aussi… Il parvenait toujours à éviter de répondre lorsqu’elle le questionnait que ce soit quand il rentrait tard et qu’elle avait passé la majeure partie de la soirée seule, ou encore quand il partait en douce dans la nuit ou au petit matin en la pensant profondément endormie. Elle avait été plus d’une fois blessée et avait bien pleuré en douce à plusieurs reprises. N’importe qui aurait accusé son Nolan d’aller voir ailleurs ou de se lasser d’elle. N’importe qui l’aurait blâmé en se plaignant encore et encore. N’importe qui l’aurait mis au pied du mur en lui imposant de répondre à ses questions, en le menaçant peut-être même. Mais June n’est pas n’importe qui, et elle sait parfaitement que Nolan n’a rien de ces garçons qui font toutes sortes de crasses à leur copine. Elle se contentait donc de lui faire confiance. Après tout, s’il se lassait vraiment de cette petite inutile, fragile et timide à souhait, il n’avait pas si tort. Mais surtout, si elle l’ennuyait vraiment, pourquoi diable l’emmener faire ce merveilleux voyage rien qu’eux deux ? Autant dire que les craintes et les questions avaient quitté l’esprit de la jeune fille dès qu’elle eut fini de faire ses bagages. Elle avait été si heureuse de prendre l’avion pour la première fois, de voir Beacon Hills rétrécir sous ses pieds et avec cette fichue cité tous ceux qui lui créaient plus d’angoisse et de soucis qu’autre chose. Si heureuse d’arriver aux côtés de Nolan et de poser les pieds pour la toute première fois en Nouvelle-Orléans. Elle n’avait cessé de sourire, de rire, de l’embrasser, de le serrer contre elle, cherchant à dissimuler cette pointe d’angoisse, de gêne et de crainte qui n’avait pas arrêté de la titiller depuis qu’ils étaient arrivés... Après tout, tout ne pouvait pas se passer à la perfection, cela aurait été bien trop beau, et le vécu de la jeune fille ne la laissait pas se voiler les yeux. Pourtant, elle ne savait pas d’où cette peur venait, elle l’appréciait que très peu, ce nuisible ternissant son beau tableau de vacances en amoureux. Rien ne s’était passé le soir de leur arrivé, ni même la nuit, alors qu’ils se promenaient, main dans la main dans les ruelles du quartier français, pas plus lorsqu’ils avaient posé leurs valises dans leur Airbnb. Rien. Rien ne justifiait ce stress qui lui pressait le cœur. Elle cherchait à se convaincre que sa peur du changement et de la nouveauté était la cause de telle angoisse. Si elle avait su que ce n’était pas sorti de nulle-part, peut-être aurait-elle rebroussé chemin de suite en pressant son précieux Nolan avec elle. La première nuit avait été longue. June l’avait passée cachée dans les bras de Nolan à essayer de se rassurer et de faire taire son crâne, bien plus à même à la malmener une fois le ciel assombri et la lune à son apogée. Elle s’était extirpée de son étreinte chaleureuse aux premières lueurs du soleil, se faufilant derrière les rideaux de lin blanc pour ouvrir les volets en bois émeraude, ses pieds nus se réchauffant lentement sous la chaleur matinale du soleil. Inspirant longuement et s’étirant sur le balcon elle décida alors de laisser cette fichue peur de côté et d’enfin profiter pleinement de ce voyage et surtout de son amoureux. Elle n’y manqua pas tout au long de cette journée, son sourire ne cillant pas, se s’évanouissant pas une seule seconde, osant même échapper quelques timides éclats de rire en public continuant de visiter les nombreux secrets de la cité, émerveillé lorsqu’elle percevait certaines soi-disant sorcières échanger quelques mots dans cette langue si jolie qu’est le français. Tout allait pour le mieux. Le soleil brillait aux éclats, leurs visites se déroulaient à la perfection, les boutiques faisaient papillonner les yeux de June qui ne manquait de harceler son sorcier de petit-ami de questions sur ce qu’il utilisait lui ou non dans ces sortilèges et autres rituels magiques. Même les gens lui semblaient presque sympathiques et non menaçants, moqueurs et hargneux comme elle les voit la plupart du temps… Tout se déroulait à la perfection, mais toute bonne chose à une fin. Si seulement cette fin avait pu arriver à la fin de leur séjour… Ils sortaient à nouveau main dans la main d’un de ces cafés aux boissons aussi gourmandes qu’exquises et aux goûters sucrés à souhait. June avait toujours le nez en l’air, écoutant le Jazz qui s’échappait d’enceintes fichues çà et là dans les rues. Le soleil était toujours au rendez-vous, l’après-midi étant à peine entamé et voilà qu’ils se dirigeaient à nouveau vers les boutiques du quartier français pour finir leur journée paisible. June avait espéré que mettre ses doutes et craintes de côté avait payé. Voilà qu’encore une fois, elle n’était que niaiserie et stupidité. Car soudain, alors qu’ils marchaient sereinement dans ces petites rues où peu de monde se trouvait, attention craquante de Nolan, tout leur bonheur vint à s’écrouler. June rentra dans quelqu’un, certes elle avait le nez en l’air, mais elle restait persuadée d’une chose, elle avait vérifié avant de lever à nouveau les yeux, il n’y avait personne devant eux. Et jamais Nolan l’aurait laissé se prendre quelqu’un, bien trop avenant et concerné pour laisser cela se faire. Pourtant, l’homme était bel et bien là, à quelques centimètres à peine de June, la contemplant comme elle avait contemplé les pâtisseries dans la vitrine quelques minutes plus tôt… Son chocolat chaud coco vint s’écraser au sol, salissant les chaussures en cuir italien si bien ciré de l’homme devant elle. La panique lui arrachant presque le cœur lorsqu’elle leva enfin les yeux vers l’homme qui lui avait volontairement et violemment coupé la route. Elle fit un pas en arrière en serrant de plus belle la main de Nolan, sentant son cœur s’emballer sous le sourire se voulant sûrement charmant, mais lui paraissant tout simplement menaçant de l’homme. L’homme… Pourquoi ce mot semblait-il si mal utilisé lorsqu’elle regardait l’être lui faisant face… Elle se secoua et échappa au regard tout aussi envoûtant que dérangeant du brun pour se dissimuler tant bien que mal derrière l’épaule de Nolan, parvenant à murmurer à mi-voix, sa gorge serrée comme jamais elle ne l’avait été : « Pa-… Désolée… » D’ordinaire maladroite, voilà que l’étrange qui émanait de l’homme la rendait parfaitement pathétique…